Les écoles à vocation spéciale

*Ce billet est un travail universitaire réalisé dans le cadre du cours FPE3050 - Organisation de l'éducation au Québec.

Selon un article paru dans le journal Le Soleil du 24 octobre 2013, « Les jeunes se lèvent les matins d’école pour voir leurs amis, bouger et s’impliquer dans des activités parascolaires qui les passionnent. » C’est la conclusion à laquelle  est venue une équipe de recherche sur la persévérance scolaire de l’Université du Québec à Rimouski (UQAR) qui tentait d’identifier les raisons qui incitent au décrochage scolaire et celles qui, au contraire, motivent les élèves. Et c’est connu : les élèves motivés réussissent mieux.

Le même article souligne que les activités physiques et parascolaires sont au sommet des raisons que les élèves  interrogés dans le cadre de cette recherche ont données comme motivation à la poursuite de leurs études. Ce n’est pas étonnant, donc, que de plus en plus d’écoles se dotent de projets pédagogiques à vocations particulières comme sport-étude ou le volet international. Ces programmes répondent à un besoin bien senti et qu’importe la vocation impliquée, c’est le résultat qui compte : les élèves sont plus motivés et moins enclins à abandonner leurs études.

Ma réflexion a cependant soulevé une question très importante : la réussite scolaire est-elle l’objectif réel de ces projets pédagogiques particuliers? J’en suis venue à cette interrogation après avoir réalisé que pour beaucoup d’écoles à vocation particulière, il faut réussir un examen d’admission. Ces tests sont-ils vraiment pertinents? Les programmes « accrocheurs » ne devraient-ils pas s’adresser aux élèves à risques plutôt qu’aux élèves qui sont assez doués pour réussir l’examen d’entrée?

Pour moi, les examens d’admission à ces programmes n’ont pas leur place s’ils servent à ne choisir que les meilleurs élèves. En créant un phénomène d’élitisme, les écoles qui basent la sélection d’élèves admis sur un examen ne respectent pas le principe d’égalité des chances auquel elles doivent se soumettre selon la Loi sur l’instruction publique.

En gardant la motivation des élèves comme objectif, ces examens devraient servir à évaluer les élèves pour permettre de faire des groupes plus homogènes vis-à-vis de la culture générale et des capacités, de sorte que l’enseignement prodigué soit plus efficace et ciblé. Loin de stigmatiser les élèves comme le ferait une sélection élitiste, l’accessibilité de ces programmes à tous les élèves et la composition des classes basée sur le niveau de développement permettraient effectivement d’augmenter la motivation des élèves. Ça permettrait également aux projets pédagogiques de remplir leur mission de favoriser la réussite pour tous.

D’autres lectures sur le sujet m’ont cependant porté à croire que la plupart du temps, les écoles qui sont dotées de projets pédagogiques particuliers l’ont fait pour faire concurrence aux écoles privées, avec comme objectif de maintenir les bons élèves dans le système public.

J’ai lu notamment un article dans une revue pour les diplômés de l’Université de Montréal que « Les écoles à vocation particulière ont d’abord été créées dans les écoles secondaires publiques pour faire concurrence aux écoles privées, qui drainaient les meilleurs élèves du système (...) ». Dans un autre article, celui-là tiré du journal La Presse du mardi 29 octobre, il est dit que « En réponse à la concurrence du privé, les écoles secondaires publiques multiplient elles aussi les programmes et les concentrations, ce qui fait en sorte que plusieurs établissements sélectionnent maintenant leurs élèves.»

Je trouve la situation préoccupante. Depuis plusieurs années, on place des élèves en difficulté dans des classes ordinaires pour faciliter leur intégration. Or, il semble que dans certaines écoles, l’implantation de programmes à vocation sert en quelque sorte à écrémer la clientèle. On place dans des classes « orientées » les meilleurs élèves, ceux qui réussissent les tests d’admission, alors qu’on laisse les élèves moins performants (et par conséquent les élèves en difficulté) dans les classes ordinaires, réduisant presque à néant les modèles positifs pour les élèves en difficultés. Ces classes à vocation spéciales où les enfants sont triés sur le volet pourraient-elles avoir l'effet pervers de nous faire assister graduellement à un retour des classes spécialisées, faute de bons élèves pour remplir les classes ordinaires ?

En conclusion, je trouve que c’est fantastique que quelqu’un ait enfin compris qu’à l’école, la motivation passe par les activités transversales et la socialisation. Je suis également très heureuse de penser qu’il existe déjà des éléments du système scolaire qui permettent de combler ces besoins spécifiques des élèves. J’émets cependant une certaine réserve quant à l’utilisation actuelle de ces éléments, qui n’ont peut-être pas le bon objectif s’ils ne sont pas accessibles à tous.

Bibliographie

Mathieu, Annie. 2013. "Les activités sociales à l'école, la priorité des jeunes". Le Soleil (Québec. En ligne. 24 octobre 2013. <http://www.lapresse.ca/le-soleil/actualites/education/201310/23/01-4702975-les-activites-sociales-a-lecole-la-priorite-des-jeunes.php>. Consulté le 24 octobre 2013.

 

Sauvé, Mathis-Robert. 2013. "À l'école des vocations particulières: Les projets centrés sur les arts, les sports ou la science ont la cote". Les diplômés: la revue des diplômés de l'Universit de Montréal (Montréal). Automne 2013. P.14

 

Breton, Pascale. 2013. "Recrutement d'élèves: les établissements publics font aussi un tri". La Presse (Montréal). 29 octobre 2013. P. A-14.

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